L’éléphant du zoo de Bâle a été euthanasié le 9 août après avoir contracté la tuberculose

Tusker au zoo de Bâle

Tusker montrait des signes d’apathie depuis plusieurs mois. La suspicion d’une tuberculose aiguë ayant été confirmée, le zoo a pris la décision de l’euthanasier, déplorant la mort de sa «star des réseaux sociaux». Filmées, ses acrobaties avec des troncs d’arbres posés sur des poutres métalliques connaissaient un succès notable sur les plateformes comme YouTube ou Tik Tok.

Une (triste) vie de mâle reproducteur

Né en 1992 en Afrique du Sud dans le parc national Kruger, Tusker avait été «prêté» au zoo de Bâle par les Pays-Bas en 2021 comme étalon reproducteur. Parmi les trois éléphantes Rosy, Maya (28 ans) et Heri (47 ans) détenues en captivité avec lui, c’est la plus âgée qui est devenue portante en décembre 2022, malgré les risques liés à son âge.
Tusker aurait ensuite dû être envoyé en Espagne, pour poursuivre son activité de reproducteur. Avec la naissance de 16 éléphanteaux à son actif, Tusker a passé une bonne partie de sa vie à être transféré de zoos en zoos.
Avant d’arriver à Bâle, Tusker avait vécu plusieurs années en captivité en Allemagne dans le «Zoologischer Garten Wuppertal», qui détient 5 000 animaux appartenant à plus de 500 espèces différentes. Le zoo de Wuppertal est également en charge du programme d’élevage de conservation de l’EAZA (Association européenne des zoos et aquariums) pour les éléphants d’Afrique.

Un parc qui ne sait plus quoi faire de ses éléphants

Est-il vraiment nécessaire de faire se reproduire des éléphants à des fins de «conservation de l’espèce» ? Dans le cas de Tusker, originaire du parc Kruger, sa reproduction est loin d’être justifiée. Plus grand parc animalier d’Afrique du Sud s’étendant sur près de 20’000 Km2, ce parc à longtemps fait l’objet de critiques dans la gestion de ces animaux. A l’exemple de ses éléphants en surnombre. Le parc ne les abat plus en masse (1) depuis la fin des années 1990 mais tente de les délocaliser dans d’autres parcs ou zoos. Mais avec une population de presque 30’000 éléphants (2) pour une population idéale de 8’000, l’équilibre écologique du parc reste sensible. Reste la question posée : la reproduction des éléphants est-elle une nécessité à des fins de conservation ? Ou un prétexte pour continuer à rendre les zoos attrayants et attirer le public ?

Reproduction, élimination

Si les naissances font toujours une bonne publicité aux zoos et sont la garantie de leur attirer un public sensible à la vue de jeunes animaux, leur élimination quelques mois plus tard ou une fois l’âge adulte atteint fait rarement l’objet d’une annonce aux médias. Combien d’animaux sont éliminés chaque année ?
En 2014, une enquête du média britannique BBC révélait que 3000 à 5000 animaux étaient tués annuellement dans les zoos européens. Mais sans faire de distinction entre les animaux surnuméraires et ceux ayant été euthanasiés pour des raisons médicales ou de vieillesse. La même année, Marius, un jeune mâle girafe de deux ans était abattu au zoo de Copenhague. Celui-ci l’avait jugé génétiquement impropre à une future reproduction, ses gènes étant surreprésentés dans la population captive. Cette décision avait suscité l’indignation après qu’il soit apparu qu’au moins deux parcs animaliers avaient accepté de l’accueillir. Marius avait été démembré et donné en pâture aux lions du zoo. Certains parmi eux n’ont pas eu beaucoup plus de chance, puisque deux ans plus tard ce même zoo en éliminait quatre. Deux jeunes de 10 mois et deux adultes. La raison évoquée était que les deux mâles adultes étaient «devenus vieux», et que le zoo devant accueillir un nouveau lion pour se reproduire avec les femelles, il aurait tués les jeunes «dès qu’il en aurait eu la possibilité».
En 2016 toujours, c’est le zoo norvégien de Kristiansand qui choquait ses visiteurs, en servant à ses tigres le corps décapité d’un zèbre.

Zoo de Copenhague

Zoo de Copenhague

Des euthanasies édictées par l’EAZA

Le chiffre de la BBC n’est d’ailleurs pas contesté par l’EAZA, qui gère les populations d’animaux dans ses structures. Son président expliquait que les animaux étaient généralement «exécutés pour éviter les conséquences débilitantes de la consanguinité en captivité». L’euthanasie d’animaux fait même partie des règles édictées par l’EAZA, qui indique le nombre et le type d’individus d’une même espèce que chaque zoo peut posséder, ceux qui peuvent se reproduire et ceux qui ne le peuvent pas. Elle interdit également à ses membres de vendre ou céder leurs animaux à des zoos qui ne font pas partie de l’EAZA.
Pour la directrice générale déléguée (3) du parc et château de Thoiry situé au nord-ouest de Paris et membre de l’EAZA, «un zoo n’est pas la SPA. Il n’a pas pour vocation de préserver chaque individu, mais de conserver l’espèce et sa diversité génétique. Posons-nous la question : vaut-il mieux privilégier le bien-être d’un animal quand il est vivant ? Ou privilégier un maximum d’animaux coûte que coûte, avec les problèmes d’inconfort et de mal-être que génère pour eux la surpopulation ?»

Sources :

(1) On estime à 10’000 le nombre d’éléphants abattus dans le parc Kruger entre 1965 et 1995. Un abattoir attenant au parc avait même été construit pour traiter le commerce lucratif des carcasses. Les tirs par les rangers qui visaient l’élimination de familles entières étaient considérés comme peu efficaces, les dégâts à la flore étant surtout le fait de vieux mâles isolés. Par la suite, le parc a mis en place le programme PZP (Porcine Zona Pellucida) de contraception pour les femelles.

(2) 27’998 éléphants ont été comptabilisés lors du dernier recensement effectué en 2021.

(3) https://www.letemps.ch/societe/zoos-peuvent-tuer-leurs-animaux